La Méthodologie d’Analyse Littérale du Coran est une approche systématisée permettant de rationaliser la démarche analytique nécessaire à la détermination du Sens littéral. Cet algorithme de résolution comporte 5 étapes : 1- Analyse lexicale ; 2- Analyse sémantique ; 3- Analyse contextuelle ; 4- Analyse de la convergence coranique ; 5- Résolution du sens littéral. L’analyse lexicale est logiquement la première phase de ce processus, elle correspond à l’étude des significations potentielles des termes-clefs de tel ou tels versets.
1 – Base de l’analyse lexicale
L’analyse lexicale renvoie principalement à la polysémie des termes et des locutions, capacité propre à toutes les langues à partir d’un vocabulaire courant nécessairement limité. Concernant le Coran, le problème est d’importance compte tenu des particularités de la langue arabe et, plus encore, de la langue coranique. La polysémie recouvre deux aspects, le premier est énonciatif et est donc envisagé lors de l’Analyse sémantique, le second est terminologique. Celui-ci comprend la pluralité des sens conjointe à un même terme, la signification figurée de certaines locutions, les néologismes coraniques et les divers procédés métaphoriques.
a)- S’agissant de la polysémie des termes, nous rappellerons que l’on récense par exemple pour le terme dîn cinquante-trois acceptions de sens.[1] De même, l’on en dénombre soixante-deux pour la racine verbale ḍaraba. Ce verbe arabe est en fonction l’équivalent de notre verbe faire : un verbe à tout faire. Cette polysémie n’est pas sans conséquence lorsque ḍaraba, signifiant couramment frapper au sens propre comme au figuré, est employé dans le verset supposé affirmer que le Coran autorise peu ou prou à frapper les femmes, S4.V34. Or, nous avons montré qu’en ce verset le sens du verbe ḍaraba en wa–ḍribû-hunna ne signifiait pas frappez les femmes, mais : éloignez-vous d’elles, ce conformément à la polysémie de ḍaraba et aux usages de la langue arabe et en cohérence avec le Message coranique, voir : Frapper les femmes selon le Coran et en Islam.
Signalons que la polysémie des termes arabes est généralement surestimée, notamment lors du processus de traduction/interprétation. En effet, les significations des noms verbaux/maṣdar dépendent seulement et exclusivement de la forme verbale de laquelle ils dérivent et ne peuvent être compris en fonction des significations d’autres noms verbaux de la même famille verbale. De même, les dix formes verbales dérivées possibles d’une même racine trilitère ont généralement des significations déterminées, délimitées et non interchangeables. Ainsi, à titre d’exemple, lit-on fréquemment que le mot islâm signifie paix du fait que les noms verbaux silm ou salm ont ce sens, affirmation linguistiquement infondée. L’on dit tout aussi couramment que la forme verbale de type IV aslama, dont islâm est bien le nom verbal, signifie entrer dans la paix, se pacifier, ou au contraire se soumettre, ce qui par conséquent conférerait à islâm les sens de paix ou de soumission. Or, seules les formes verbales III [sâlama], VI [tasâlama] et VIII [istaslama] connotent la notion de paix. En conséquence, pour parler de comportement pacifique le Coran utilise les termes silm ou salm et jamais celui de islâm ou le verbe aslama, ex. : « Ô croyants ! Saisissez-vous pleinement de la paix/salm et ne suivez point les pas du Shaytân, car il est pour vous un ennemi déclaré ! », S2.V208. Il y a donc bien déviation lexicale et ampliation étymologiquement non justifiée de la polysémie du terme islâm.[2] Enfin, nous ajouterons que dans la détermination des significations l’on ne tient pas toujours compte, à tort, du rôle des prépositions [bi, fî, ‘alâ, etc. ] qui, en arabe, lorsqu’elles sont associées à l’emploi d’un verbe en précisent et en limitent le sens.
b)- S’agissant de la polysémie des locutions, citons l’exemple de l’expression coranique mâ qatalû-hu yaqînan, S4.V157.[3] Celle-ci, relative à la problématique de la crucifixion de Jésus et au rôle supposé des juifs à l’occasion, est d’ordinaire comprise comme signifiant : ils [les juifs] ne l’ont pas [mâ] tué [qatalû-hu] certainement [yaqînan], soit : ils ne l’ont certainement pas tué, ce qui revient à soutenir la thèse de la non-crucifixion. Par contre, Tabari et d’autres ont signalé que mâ qatalû-hu yaqînan était un arabisme ayant pour sens ils n’en eurent aucune certitude. Sur la résolution de point sensible, voir : La crucifixion de Jésus selon le Coran et en Islam.
c)- S’agissant des systèmes métaphoriques : paraboles, allégories, anagogie, alors même que le concept de Sens littéral pourrait sembler écarter de principe toutes formes de symbolisme. Cependant, la démarche littérale doit au contraire prendre en compte l’aspect allégorique d’un texte, aspect essentiel. Mais, pour ne pas être interprétative, cette opération ne peut avoir lieu que si ce texte présente des marqueurs sémantiques indiquant lesdits procédés métaphoriques et leurs lignes de résolution. Exemple en S2.V264 où nous lisons : mathalu-hu ka-mathali ṣafwân/son exemple est l’exemple d’un rocher ou, mieux : allégoriquement il est à l’image d’un rocher. Par ailleurs, les données sémantiques, ou à défaut contextuelles, permettent d’elles-mêmes de déterminer si tel propos est au sens propre ou au sens figuré. Exemple : « Celui qui était mort et que Nous avons ramené à la vie et à qui Nous avons donné une lumière afin qu’il aille parmi les hommes serait-il à l’image/mathal de qui est dans les ténèbres sans pouvoir en sortir ? C’est ainsi qu’est embelli aux yeux des polythéistes[4] ce qu’ils œuvrent. », S6.V122.
– S’agissant des néologismes coraniques, nous préciserons que cette dimension est très mal prise en compte par l’exégèse classique, mais aussi contemporaine. Par néologisme, nous n’indiquons pas que le Coran fabriqua de nouveaux termes, mais, qu’à partir du vocabulaire de l’arabe de son temps, lexique essentiellement concret ou naturaliste, il forgea par réemplois néologiques une partie du vocabulaire conceptuel qui lui était nécessaire. Le procédé n’est pas rare, citons : le mot bârî’ qui en tant que participe actif de la racine arabe bara’a[5] et concernant l’action de Dieu signifiera Libérateur, S2.V54 ; l’emploi de la racine nazala et de ses dérivés anzala et nazzala qui est spécifique aux processus de révélation tels que le Coran les conçoit, alors que l’arabe utilisait uniquement waḥâ et awḥâ, verbes qualifiant l’inspiration faite aux devins et aux poètes ; la locution ahlu–l–kitâb/Gens du Livre s’entendant abstraitement comme signifiant la « Communauté du Livre », c’est-à-dire l’ensemble des communautés religieuses s’étant formées à la suite des révélations faites par Dieu par l’intermédiaire de leurs prophètes fondateurs ; le terme wajh/visage qui désignait chez les Arabes la meilleure partie d’une chose, mais qui dans le Coran qualifiera l’être, le soi et, concernant Dieu, l’Essence divine ou Sa “Face” ; l’adjectif wâsi‘un signifiant vaste, large, qui, s’agissant de Dieu, impliquerait qu’Il eût des limites spatiales, se comprendra alors par Infini ; le célèbre qualificatif kâfir qui pour les Arabes indiquait le semeur ou l’ingrat, mais qui dans le Coran caractérisera celui qui enfouit en lui-même la connaissance innée de Sa seigneurialité, acte de déni en toutes les acceptions de ce terme, d’où pour kâfir : dénégateur.[6] Il faudra donc rester vigilant face à des termes pouvant paraître incongrus ou contextuellement mal intégrés, ainsi qu’en regard des hapax ou du vocabulaire dit non-arabe, et étudier toujours en ce cas la possibilité néologique. Nous mentionnerons plus avant quelques exemples concernant ces deux dernières catégories lexicales coraniques.
2 – Méthodologie de l’analyse lexicale
Du point de vue méthodologique, l’analyse lexicale nécessite impérativement d’examiner la polysémie des termes employés pour chaque verset, y compris celle générée par les variantes ou qirâ’ât,[7] tout en tenant compte de la fixation anachronique possible du vocabulaire coranique, sur ce point voir : Les réentrées lexicales. Du fait de l’influence rétroactive de l’Exégèse du Hadîth et du Droit musulman sur la consignation lexicale du vocabulaire arabe, cette approche doit être raisonnée. Bien évidemment, cela ne pourra être mené par une étude comparée des diverses traductions du Coran disponibles, mais à partir des encyclopédies de la langue arabe. Découlant de l’ensemble des réserves que nous venons d’émettre, voici les règles principales que nous mettons en œuvre :
– Premièrement : le sens d’un terme est à rechercher in texto, c’est-à-dire dans le corpus coranique. Mais l’on doit en cela tenir compte de la polysémie dudit terme qui peut parfaitement avoir deux ou plus significations différentes dans le Coran. Le choix repose donc sur deux notions complémentaires : un terme donné peut être explicite en tel verset alors qu’il ne l’est pas en tel autre ; à contexte égal un même terme a même signification, sur ce point essentiel, voir : Analyse contextuelle. Ceci étant, ce sont les dictionnaires coraniques en langue arabe qui répertorient l’ensemble des termes coraniques et donnent leur nombre d’occurrences. Les études traditionnelles comme celle de as-Suyûṭî dénombrent 79439 mots dans le Coran, les études contemporaines répertorient informatiquement 77784 lexèmes. Ainsi, si l’on compare la recension d’un peu plus de 6600 termes coraniques au nombre total de lexèmes du Coran, même si ce décompte prend en charge les lexies les plus fréquentes comme les copules wa, fa, fî, etc., l’on mesure le fort taux de réitération du lexique coranique. De fait, cette réitération est favorisée par la structure diffractée et répétitive du Coran qui pour l’analyse lexicale est bien plus un avantage qu’un défaut coranique de composition. Nous retrouverons l’intérêt de cet aspect structurel quant à l’Analyse contextuelle. À l’évidence, ce phénomène ne vaut pas pour les hapax legomena. Ils sont souvent à tort confondus avec les termes rares, les rara ou gharâ’ib, tant il est vrai qu’ils sont assez fréquemment des vocables peu usuels, voire inusités. Par hapax, nous entendons au sens strict les mots n’ayant qu’une seule occurrence radicale dans le corpus coranique. Pour ceux-ci, il conviendra en premier lieu de rechercher une origine non arabe et, en second, de déterminer leur(s) signification(s) en fonction du contexte sémantique et du contexte d’énonciation, mais, somme toute, ces cas sont peu nombreux. Il a été recensé selon ce critère 248 hapax dans le Coran.
– Deuxièmement : repérer les anomalies de systématisation lexicales. Ceci est bien connu, le classement du vocabulaire dans les dictionnaires arabes n’est pas alphabétique, mais radical. Ainsi, chaque terme est-il classé dans la racine verbale de laquelle il semble dériver, ce qui revient selon cette logique linguistique à procéder étymologiquement. Or, si cela est très pertinent pour les noms communs arabes du fait des mécanismes de construction spécifiques aux langues sémites, il en découle que les mots non arabes, mais arabisés, seront artificiellement rattachés par homonymie à une racine de structure apparentée à priori. Par exemple, l’on peut observer que l’hapax fîl/éléphant en S105.V1 a été classé par les philologues arabes à la racine verbale fâla qui signifie pourtant être faible, ceci par conformité apparente au schème nominal de la racine correspondante dite concave. Le rapport sémantique est conséquemment paradoxal et improbable, l’on note même que le nom verbal régulier fîl signifie logiquement faible, débile. Cette contradiction signe l’origine étrangère du terme, probablement issu du pehlevi, tout comme à l’inverse le fait qu’il existe des dérivés comme fayyâl/cornac ou la forme istafayala/se faire épais comme un éléphant indique son arabisation ancienne. De manière globale, il est ainsi possible de repérer des anomalies lexicales, y compris s’agissant de mots sans conteste arabes. En effet, constater pour un terme une signification différant du champ lexical de la racine à laquelle il est afféré peut signaler un sens qui lui aurait été attribué postérieurement, notamment sous l’influence de l’Exégèse et du Droit, voir : Les réentrées lexicales.
Présentement, nous mentionnerons à titre d’exemple un cas mettant en évidence l’empreinte dogmatique de l’Islam sur le vocabulaire coranique. L’on trouve en S2.V138 le terme ṣibgha. Celui-ci se rattache sans conteste à la racine ṣabagha signifiant tremper, teindre, immerger et il a été, et l’est encore, logiquement utilisé par les Arabes chrétiens pour désigner le baptême par immersion. Par ailleurs, ce terme semble avoir été intégré anciennement à la langue arabe à partir du syriaque. Le champ lexical radical de ce terme est donc cohérent. En ce verset, ṣibgha est en annexion avec le nom Allâh : ṣibghata–llâhi, ce qui s’entend sans difficulté par baptême de Dieu. Ledit verset se lit : « Au Baptême de Dieu ! Car qui est plus excellent que Dieu en baptême… ». Cette lecture est contextuellement cohérente eut égard au passage entièrement dédié au dépassement des clivages religieux entre religions monothéistes en lequel s’insère ce verset. Pour autant, les exégètes – lorsqu’ils n’ont pas rendu littéralement ṣibgha par couleur, la locution couleur de Dieu nécessitant alors d’être surinterprétée – se sont ingéniés à en déplacer le sens et ont affirmé que l’on devait entendre ṣibgha par religion. La religion de Dieu étant bien sûr en leur perspective l’Islam, ce qui inverse alors le sens apparent de ce verset, sauf que l’on pourrait à minima objecter que le segment faisant alors suite « et qui est meilleur qu’Allâh en Sa religion/ṣibghatan » ne fait alors guère sens. Or, cette signification est clairement hors du champ lexical de la racine ṣabagha comme du reste l’indique le fait que le mot ṣibgha ainsi connoté ne produit aucun dérivé. Pour autant, les lexiques arabes ou français-arabes donnent pour ṣibgha le sens de religion, témoignant en cela du verrouillage de sens que l’Exégèse a su rétrospectivement imposer au glossaire coranique, voir : Les réentrées lexicales.
– Troisièmement : pointer les termes dits non-arabes. La plupart du temps, ils sont en réalité arabisés/mu‘arrab dès avant le VIIe siècle. Bien que l’on ait beaucoup spéculé sur la présence de ce vocabulaire étranger dans le Coran, le fait n’a en soi rien de particulier. L’Arabie n’était pas un désert culturel ou religieux, bien au contraire, elle s’avère avoir été un vaste carrefour de communication. Ainsi, selon l’historien arien Philostorgen, entre autres nombreuses religions de la Péninsule et de ses alentours, le judaïsme domina-t-il le Yémen himyarite dès le IVe siècle, sa pratique est par ailleurs confirmée à partir du Ve siècle par les sources internes. Conséquemment, comme le rappelle l’épigraphiste C. Robin, les termes ṣalât, zakât ou le nom ar–raḥmân ont été construits en langue sudarabique par emprunt à l’araméen. Il n’y a rien donc d’étrange ou d’étranger à ce que ce lexique religieux déjà commun aux juifs et aux chrétiens ait été intégré ensuite aux parlers nord arabiques, monde où le judaïsme, mais aussi nombre de mouvements chrétiens dominaient dans les grandes oasis du Nord.
Méthodologiquement, la présence de nombreuses variantes de récitation/qirâ’ât pour un mot donné est un bon indicateur de sa nature “étrangère”. Il en est ainsi du mot ṣirâṭa bien connu pour signifier la voie que l’on emprunte. L’origine étrangère de ce terme est signée par le fait qu’il est affecté par deux variantes coraniques : sirâṭ, zirâṭa. De toute évidence, il n’est pas d’origine arabe et il est logiquement rattachable au latin strata. De fait, il n’existe pas de racine verbale dont le nom ṣirâṭ serait dérivé pas plus qu’il n’existe de dérivés de ce nom.[8] Ceci étant, suite aux travaux de Jeffery, l’islamologie répertorie 275 termes dits d’origine non-arabe, mais, là encore, il faut rester vigilant, car cette liste n’est pas exempte d’erreurs. Ainsi, selon nous, ont été à tort classés “étrangers” les termes suivants : ṣibgha/baptême ; taḥt/intérieur ; hayta laka/viens ! ; sayyid/mari ; sakar/vin ; ḥaram/consacré ; alîm/douloureux ; kâhin/devin ; ḥabl/corde ; ma‘în/source, khinzîr/porc ; zayt/huile ; ṭîn/figue ; ‘ankabût/araignée ; rawḍa/pâturage ; dihâq/ras bord. D’autres, pourtant connus en tant que tel, ont été omis en cette liste, citons : ummiyy/Gentils ; miḥrâb/sanctuaire. Enfin, il semble que l’on puisse identifier d’autres termes, rappelons le cas de hudâ qui vient du grec hodos/voie, mais se trouve mimétiquement intégré en la racine arabe hadâ/guider. Idem pour ṭall [hapax en S2.V265] signifiant en hébreu rosée et ayant le même sens en arabe, alors que ce terme se trouve classé dans les dictionnaires arabes à la racine ṭalla : verser impunément le sang d’un homme.
Ceci étant, ces interférences étymologiques croisées renvoient fréquemment à des liens intertextuels, vaste corpus religieux du Grand Moyen-Orient, et permettent de déverrouiller certaines affirmations exégético-lexicales. Néanmoins, cette démarche impose en retour une grande prudence d’utilisation. La philologie doit savoir ici raison garder et ne pas sombrer dans la surinterprétation ou l’arbitraire, attitudes relevant plus des jeux de mots que du jeu des mots, cf. en la matière les dérives de type Christoph Luxenberg.
Conclusion
Aussi essentielle que soit l’analyse lexicale, elle n’est que le premier temps de l’Analyse Littérale du Coran, cela signifie qu’elle n’est qu’une opération de reconnaissance. Elle permet seulement dans un premier temps de collecter de manière neutre des données lexicales intratextuelles qui, afin de procéder à une sélection terminologique confirmée, doivent être éliminées ou sélectionnées par la mise en œuvre des deux étapes faisant logiquement suite : l’Analyse sémantique et l’Analyse contextuelle. Bien évidemment, lors de l’analyse littérale d’un verset, tout nouveau verset mis en jeu par intratextualité doit lui aussi être étudié selon cette approche, voir : Sens littéral et Intratextualité.
De ce fait, l’analyse lexicale ne fournit jamais à elle seule le Sens littéral d’un verset. Autrement formulé, il ne suffit pas de spéculer sur la polysémie des termes coraniques pour dégager la signification de tel ou tel verset, signification en l’occurrence présupposée par interprétation préalable et/ou ouvrant la porte à l’interprétation. Il ne s’agit là que d’une mauvaise pratique très en vogue dans la nouvelle exégèse, laquelle n’a en ce cas d’autre objectif que de justifier à peu de frais telle ou telle interprétation. Sur ce point, voir notre analyse critique de l’Interprétation infinie du Coran et, plus fondamentalement encore, le rejet coranique de l’interprétation en tant que modalité de compréhension du texte coranique : L’interprétation du Coran selon le Coran et en Islam.
Dr al Ajamî
[1] Cf. notre thèse doctorale : Analyse littérale des termes dîn et islâm dans le Coran ; dépassement spirituel du religieux et nouvelles perspectives exégétiques – https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01556492/document
[2] Pour plus de détails, cf. Le terme islâm selon le Coran : l’Islam-relation.
[3] Cette expression connaît ici potentiellement trois sens : 1- ils ne l’ont pas tué, c’est certain ; 2- ils ne furent pas sûrs de l’avoir tué ; 3- ils n’en eurent aucune certitude.
[4] Contextuellement, il n’y a pas de doute à ce que le pluriel kâfirûn désigne ici les dénégateurs polythéistes, en l’occurrence mecquois.
[5] La racine bara’a vaut pour être exempt de, être affranchi de, etc. C’est donc imprudemment que l’islamologie, suite à Jeffery, lui-même suite à l’exégèse classique, elle-même s’étant ici inspirée du Talmud, classe ce terme parmi les emprunts à l’araméo-syriaque, avec alors le sens de créateur.
[6] Sur l’essentielle définition coranique du kufr et de son substantif kâfir, voir : Foi et non-foi, îmân et kufr selon le Coran et en Islam.
[7] Cf. Variantes de récitation ou qirâ’ât.
[8] Signalons qu’Ibn Qayyîm al–Jawzyya admettait étymologiquement les racines verbales ṣaraṭṭa et aṣraṭa, hypothèse assez fantaisiste que les lexicographes arabes ont sagement rejetée, mais qui témoigne de la volonté dogmatique de son auteur d’arabiser la totalité de la langue du Coran. Cf. Ibn Qayyîm al–Jawzyya, Badâ’i‘ at–tafsîr, Dâr Ibn al–Jawzyya, Ryad, 2006.