Dans les trois précédents volets de cette réflexion consacrée au fondamentaux nous reliant au Coran,[1] nous avons abordé plusieurs aspects de la problématique. Force est de constater que ce champ théologique a été peu exploré, car croire que le Coran a été révélé par Dieu relève en définitive de la foi. Conséquemment, le phénomène de la Révélation n’a pas été réellement l’objet d’une approche rationnelle. Or, de manière remarquable, le Coran en l’autoréférentialité qui le caractérise fournit de nombreuses indications concernant autant sa nature que sa structure. En l’article 1– Inspiration et Révélation selon le Coran nous avons précisé le distinguo coranique entre ce qui relève de l’inspiration et de la révélation. En l’article 2 – Terminologie de la Révélation selon le Coran nous avons étudié la richesse verbale coranique exprimant la typologie du processus de révélation. En l’article 3 – Théorie de la Révélation selon le Coran nous avons mis en évidence à partir de nombreux versets-clefs les mécanismes intrinsèques mis en œuvre pour réaliser la révélation proprement dite, c.-à-d. du Domaine ontologique de Dieu jusqu’à la réception d’un message divin par un prophète humain. À partir de ces résultats essentiels, nous sommes donc à présent en mesure d’envisager en quels termes le Coran se définit en tant que manifestation concrète du processus révélatoire, c.-à-d. après sa révélation. Cette étude portera donc sur les termes âya, sûrat, qur’ân, kitâb, par lesquels le Coran se définit structurellement, c.-à-d. du point de vue de sa composition et constitution une fois révélé au Prophète. Ceci exclut de facto les qualificatifs que le Coran a pu se donner lui-même comme al–furqân/le Discernement,[2] adh–dhikr/le Rappel,[3] ainsi que les nombreux noms que la Tradition a attribués au Coran à partir de vocables coraniques plus ou moins détournés de leur objet, de 10 à 90 selon les auteurs, citons : la Lumière/an–nûr ; Le Guide/al–hudâ ; la Guérison/ash–shifâ’ ; la Miséricorde/ar–rahma, etc. Le présent article traitera donc en particulier des différentes acceptions du terme-clef âya.
I – Le terme âya
Il s’agit d’un des termes qui connaît le plus d’occurrences coraniques, 87 mentions au singulier âya et 295 au pluriel âyât, soit un total de 382 occurrences. En comparaison, le terme kitâb est retrouvé à 261 reprises[4] et le terme qur’ân 70 fois. Cependant, le terme ’âya que nous transcrivons par âya est polysémique et comme nous allons le constater il est assez peu souvent employé au sens de verset. Or, c’est cette signification qui ici nous intéresse puisque le Coran désigne ainsi sa plus petite unité textuelle et structurelle. En effet, l’on y trouve nulle autre mention technique comme phrase/jumla, mot/lafẓa ou lettre/ḥarf. Notons que le terme kalima[5] dans le Coran n’est jamais employé au sens de mot, mais de propos, parole, c.-à-d. le message révélé en tant que signifié et non en tant que signifiant, et il en est de même pour les termes qawl, ḥadîth, qaṣaṣ qui dans le Coran ont pour sens propos, dire, récit, et ne concernent donc pas non plus son aspect structurel.
1- Significations du terme âya
– Dans un premier temps, notre analyse littérale met en évidence plusieurs significations coraniques pour âya : signe, Signe, miracle, signe miraculeux, exemple, preuve, enseignement, verset, autant de sens répertoriés dans les lexiques qui mentionnent aussi que par âya l’on désigne un indice, une borne, un jalon. Globalement, l’idée exprimée par ce champ lexical renvoie à ce qui se montre à voir et donc au signe. C’est bien en ce sens que les Arabes entendaient le terme âya, au pluriel âyât, en ses occurrences coraniques majoritaires, ex. : « en la variation des vents et des nuages contraints entre ciel et terre, il y a en vérité des Signes/âyât pour ceux qui réfléchissent. », S2.V164 ; « il y eut aussi pour vous un signe/âya quant aux deux troupes qui se firent face », S3.V13. Le mot âya renvoie ici à un élément perçu concrètement, mais qui en tant que signe manifesté donne à penser une chose absente non manifestée, il est l’indice et l’indicateur d’autre chose que lui-même. Il nécessite pour faire sens à l’instant un acte de compréhension ou d’interprétation de la part de ceux qui le reçoivent en tant que tel : « ceux qui réfléchissent ». Ceci justifie que âya valait aussi pour preuve : « malgré tout, il leur sembla après avoir considéré les preuves/âyât qu’ils devaient le jeter au cachot un certain temps », S12.V35. Selon cette même logique âya prit le sens d’exemple à méditer, le signe-exemple n’est ici concret qu’à des fins allégoriques : « quant à la bonne terre, elle abonde en végétation avec la permission de son Seigneur. Quant à la mauvaise, elle ne produit que fort peu. C’est ainsi que Nous déclinons les exemples/âyât pour des gens reconnaissants », S7.V58. Par extension âya désigna non plus le signifiant lui-même, mais le signifié : « ceux-là se seront perdus eux-mêmes du fait qu’ils furent injustes envers Nos enseignements/âyât », S7.V9. Comme à la croisée des éléments précédents âya désignait aussi un miracle, c.-à-d. un signe manifestant une rupture d’avec la normalité alors compris comme la manifestation d’une puissance occulte : « Nous avons missionné Moïse avec Nos miracles/âyât », S7.V103, d’où : « Les dénégateurs disent : Que ne lui a été attribué [à Muhammad] un signe miraculeux/âya de la part de son Seigneur. », S13.V7. Enfin, voici un exemple avec le terme âya au singulier et au sens avéré de verset : « … aucun messager n’apporte un verset/âya sans que ce ne soit par ordre de Dieu… », S13.V38. Contextuellement le sujet de ce verset porte sur un des aspects des mécanismes de révélation aboutissant à la réception par le prophète d’un ou plusieurs versets, le verset est ici ce que Dieu a révélé à un messager-prophète à partir d’un Signe/âya du Livre matriciel/umm al–kitâb comme indiqué au v39.[6]
– La polysémie textuelle réelle du terme âya dans le Coran est donc de manière préjudiciable le plus souvent gommée dans les traductions de langue française. En effet, la tendance actuelle tend à traduire quasi systématiquement les occurrences du mot âya par un uniforme signe qui lorsqu’en réalité il désigne un verset est alors compris indistinctement comme un signe signifiant exemplatif miraculeux révélé par Dieu. Tout autre signe est par suite une manifestation signifiante de Dieu et devrait être interprété tel un verset. Cette indistinction émanant d’un certain snobisme étymologique, mais aussi de commodités traductionnelles, mène régulièrement ces auteurs à assumer ce type de non-sens : « récite-leur Nos signes ». Cette attitude a pour conséquence d’appauvrir les nuances terminologiques coraniques et de rendre le sens des emplois coraniques du terme âya fort imprécis. Mais, surtout, il s’agit d’un non-sens terminologique, car en linguistique un signe est généralement un vocable et non une phrase pouvant courir sur plusieurs lignes comme peuvent l’être les versets. Un verset/âya du Coran n’est donc pas sémantiquement un signe, mais un ensemble de signes faisant sens en fonction des règles de la langue arabe qui en est le support. De même, cette confusion en génère une autre puisque selon le Coran lui-même l’on ne peut réellement qualifier de Signe/âya que le signifiant tel qu’il est dans le Livre matriciel/umm al–kitâb.[7]
2- Étymologie du terme âya
– Si les lexicographes anciens ont beaucoup divergé sur l’étymologie du terme âya/آيَةٌ, ils n’eurent par contre jamais d’hésitation à considérer que dans un certain nombre de cas il signifiait bien verset, d’où l’usage que nous connaissons tous. Ainsi, à titre d’exemple, la recension Ḥafṣ comporte-t-elle 6236 versets. L’approche islamologique moderne procède selon un parti-pris dont elle ne se cache guère : le mot âya ne signifierait pas dans le Coran verset et ce ne serait là qu’un usage postérieur en imitation de la terminologie des autres Écritures sacrées. Le sous-entendu est alors le suivant : les « auteurs » du Coran auraient bien été issus d’un milieu scripturaire juif ou chrétien, voire judéo-chrétien. Du point de vue étymologique, du fait que le mot âya est formé de voyelles-consonnes dites instables par nature il était donc théoriquement possible de le rattacher à plusieurs racines verbales. Dans les lexiques, il est le plus souvent classé tant par nécessité que par défaut à la rubrique du verbe ’awâ dont les significations principales sont : abriter, recevoir, héberger, champ lexical sans réel rapport avec les significations connues du mot âya, les autres propositions de racines verbales présentent elles aussi le même problème de cohérence lexicale. Néanmoins, l’on peut observer que les significations connues de âya auparavant rappelées ont un point commun : la notion de signe au sens de ce qui fait connaître l’existence d’une chose, un signal plus ou moins spécifique qui par sa présence interpelle celui qui le voit ou l’entend. Or, cette notion rapproche directement âya du groupe de noms interjectifs et interrogatifs tels que ’ayy/quel, lequel, c’est-à-dire, quoi, au féminin ’ayya, ou l’interjection ’ayâ servant à interpeller quelqu’un ainsi que ’iyyâ ayant valeur d’exclamation ou d’avertissement ou ’iy/certes et les vocatifs yâ et ’ayyuhâ/ô, l’ensemble de ces marqueurs ne dérivant pas à proprement parler de racines verbales, mais d’étymons relevant d’une même gamme d’onomatopées interpellatives. Nous aurons donc noté que contrairement à la position soutenue par l’islamologie, il n’était pas nécessaire de supposer que âya soit un terme non-arabe emprunté à l’hébreu ôṭ ou au syriaque âṭâ signifiant techniquement verset. Les significations du mot âya que nous venons de citer étaient comprises par les Arabes autour de la notion de signe/âya, terme qui phonétiquement et sémantiquement était alors perçu comme relevant du champ de l’interpellation et de la manifestation.
– L’on peut ainsi considérer que lorsque le Coran donna à âya le sens de verset il fit œuvre néologique, mais que comme pour tout néologisme coranique celui-ci devait être malgré tout compris par les premiers réceptionnaires. Ainsi, à partir de la notion polysémique de signe telle que mentionnée ci-dessus, un verset/âya apparaissait être une unité signifiante tout comme un signe/âya est un signifiant. Si cet emploi néologique n’est pas aussi fréquent dans le texte coranique que nous le pensons généralement, il n’en est pas pour autant absent comme l’islamologie le voudrait. C’est donc bien le contexte d’insertion qui permit aux allocutaires Arabes au temps de la révélation de comprendre que le mot âya pouvait signifier verset ainsi que ce que représentait cette notion au sein du Coran. Ceci est évident notamment lors de l’introduction de certaines sourates : « Alif ; lâm ; râ’. Ce sont-là les versets/âyât de l’Écrit/al–kitâb de sagesse… », S10.V1-2 ; « Alif ; lâm ; râ’. Écrit dont les versets/âyât ont été rendus univoques… », S11.V1 ; « Alif ; lâm ; râ’. Ce sont-là les versets/âyât de l’Écrit explicite », S12.V1. La comparaison entre ces deux derniers versets élimine l’hypothèse supposant que les âyât auraient été ici les lettres isolées introductives ou liminaires et auraient donc eu le sens de signes.[8] Citons de même typologie S26.V2 ; S28.V2 ou S13.V1 : « Alif ; lâm ; mîm ; râ’. Ce sont-là les versets/âyât de l’Écrit… » En ces versets, « l’Écrit/al–kitâb » représente la forme écrite possible de la Révélation et pour lever toute ambiguïté nous pouvons citer le verset suivant : « Ṭâ’ ; sîn. Ce sont là les versets/âyat du Coran/al–qur’ân et d’un Écrit/kitâb explicite », S27.V1. L’on en déduit donc que le terme âya/verset devait être compris comme suit : une unité textuelle récitée ou écrite. Logiquement, à l’origine, la notion de verset apparut liée à celle de récitation : « Rien d’autre, les croyants sont ceux dont tremblent les cœurs lorsque Dieu est évoqué, ceux dont la foi s’accroît quand leur sont récités/talâ Ses versets/âyât et qui en leur Seigneur placent toute leur confiance », S8.V2. C’est bien ainsi que le recevaient et l’entendaient les premiers réceptionnaires mecquois : « Et aussi, quand leur étaient transmis Nos versets/âyât et qu’ils répondaient : Nous en avons assez entendu, et si nous voulions, nous composerions la même chose que ceci… », S8.V31. Du reste, une occurrence coranique indique que la désignation de la révélation transmise sous forme de versets est précoce : « Ceux qui auront dénié Nos versets/âyât[9] seront les Hôtes du funeste côté gauche », S90.V19, cette sourate fait indéniablement partie des premières sourates mecquoises.
3- Le terme âya/verset : entité textuelle
– Selon le Coran lui-même les versets représentent la structure de base de la Révélation reçue par Muhammad et telle qui la transmettait/talâ,[10] ex : « C’est ainsi que Nous avons dépêché parmi vous un messager des vôtres, il vous transmet Nos versets/âyat… », S2.V151. Les informations convergentes ci-dessus mentionnées sont condensées en un seul verset : « Quand tu leur transmets/talâ Nos versets/âyât comme preuves évidentes, ceux qui n’espèrent point Notre Rencontre disent : Apporte-nous une autre récitation/qur’ânin que celle-ci, ou bien : Change-la ! Réponds : Il ne m’appartient pas de la changer de moi-même, je ne fais que suivre ce dont il m’est fait révélation/awhâ… », S10.V15. Il est donc ainsi certain que l’élément fondamental du Coran est le verset : « C’est Lui qui te révèle l’Écrit de Sa part : des versets/âyât univoques qui sont le principe de l’Écrit, bien que certains pourraient sembler équivoques… », S3.V7. Si l’emploi du terme âya au sens de verset était comme nous l’avons noté un néologisme coranique et si les Arabes ont pu en comprendre la signification à partir de l’explicitation de ce terme par le Coran lui-même, il leur a été de plus indiqué une référence complémentaire : « … Il est parmi les Gens du Livre une communauté droite, ils récitent les versets/âyât de Dieu aux heures de la nuit, se prosternent. », S3.V113. Sachant qu’en ce verset il s’agit contextuellement de juifs, il est donc bien indiqué que ce que le Coran nomme âyât/versets a un correspondant dans la structure et la pratique de la Thora et ses versets, dont le décompte varie entre 5800 et 6000.
– S’il est vrai que majoritairement le Coran recourt essentiellement au pluriel âyât/versets, voici outre celui précédemment cité un exemple confirmant que le concept verset existe en tant que tel : « pas un verset/âya d’entre les versets/âyât de leur Seigneur qui ne les atteigne sans qu’ils ne s’en détournent. », S6.V4. Les traductions rendent ici le terme âya par signe, mais au v5 al–ḥaqq/la vérité qui parvient aux polythéistes en question est nécessairement la révélation que leur transmet le Prophète, plusieurs autres versets de cette sourate mettent en évidence la dénégation de la Révélation par les polythéistes et donc du Coran et de ses versets d’où pour âya : verset. Par conséquent, le fait que le Coran emploie préférentiellement le pluriel âyât/versets indique que le Prophète recevait et transmettait généralement des groupes de versets/ayât formant alors des unités de composition pouvant aller du paragraphe au chapitre et jusqu’à la sourate lorsqu’elle celle-ci n’avait pas une taille trop importante. Il en résulte qu’un verset représente dans la plupart des cas une unité signifiante à l’instar de tous ceux que nous venons de citer, mais que parfois le sens voulu nécessite sémantiquement l’enchaînement de deux ou plusieurs versets. L’exemple suivant concerne les vs219 et 220 de la Sourate 2 : « … C’est ainsi que Dieu explicite pour vous les versets, puissiez-vous méditer [219] sur ce bas-monde et sur l’Autre ! … » Cette paire de versets montre aussi qu’un même verset peut parfois exprimer deux sujets différents, c’est ici le cas du v220 : « … Et ils t’interrogent quant à ce dont ils pourraient faire largesse. Réponds : Soyez pardonnés ! C’est ainsi que Dieu explicite pour vous les versets, puissiez-vous méditer [219] sur ce bas-monde et sur l’Autre ! Ils t’interrogent quant aux orphelins. Réponds : Probité à leur égard est ce qu’il y a de mieux. Si vous les mêlez aux vôtres, qu’ils soient alors vos frères… [220] ». De même : « Cherchez assistance en la persévérance et la prière, et cela est bien lourd sauf à ceux qui font preuve d’humilité, [45] ceux qui pensent rencontrer leur Seigneur et qui vers Lui reviennent. », S2.V45-46. Voici un exemple d’unité de sens couvrant trois versets : « Dis : Vous informerais-je de ce qui est meilleur que tout ceci pour ceux qui se seront pieusement prémunis envers leur Seigneur : des jardins au pied desquels courent ruisseaux où ils demeureront ainsi que des conjoint(e)s pur(e)s et l’agrément de Dieu ! Or Dieu est parfaitement clairvoyant quant à Ses serviteurs, [15] ceux qui disent : Seigneur ! Nous croyons ! Pardonne-nous donc nos fautes et préserve-nous du tourment du Feu ! [16] – les persévérants, les véridiques, les humbles, les charitables, ceux qui implorent pardon au point du jour. », S3.V15-17. Ce constat explique pour partie que le nombre exact de versets du Coran n’ait jamais été déterminé de manière fixe et qu’il oscille selon as-Suyûtî entre 6000 et 7000, 6236 versets dans la recension Ḥafṣ.
4- Le verset/âya : unité rimée
– Le chevauchement thématique sur plusieurs versets tel que nous venons de l’observer implique pour que la nomenclature verset/âya soit fonctionnelle qu’elle ne soit pas liée à la seule notion d’unité de sens, mais qu’elle soit aussi signalée par la rime ou l’assonance. Si nous reprenons à titre d’exemple le cas des trois versets ci-dessus cités, le v15 se termine de manière assonantique par le mot serviteurs/‘ibâd, le v16 par feu/nâr et le v17 par asḥâr/point du jour. En pratique, les versets se distinguent donc par la rime ou l’assonance qui sont les premiers critères perçus par l’audiant et les repères principaux du mémorisant et du récitant. Le facteur récitation prime ici sur le facteur rédaction, l’oral sur l’écrit. Il s’agissait quasiment d’une obligation structurelle, car un texte de cette longueur sans aucun repère le séquençant aurait été extrêmement difficile à mémoriser alors qu’à l’inverse la division en versets cadencés et rimés en facilitait grandement l’apprentissage, et ceci est toujours le cas. Du reste, il y a plus de rimes que de versets puisque bien souvent lorsqu’un verset est d’une certaine longueur il possède une ou plusieurs rimes internes. L’on peut de la sorte noter que même si la rime telle que nous l’entendons ne fait pas partie des règles de l’expression en hébreu, la Thora n’est effectivement pas rimée selon lesdites règles. C’est donc sous cet angle que la Thora est à l’origine un texte écrit et non un texte récité. L’on peut ainsi constater qu’il n’en est pas de même des Psaumes où le procédé appelé parallélisme donne un souffle de construction qui facilite la récitation et la mémorisation. En dehors de ce cas particulier, l’on peut dire que la si la Bible a été divisée en verset ceux-ci ne sont pas rimés. La composition en versets rimés cadencés est le signe caractéristique de l’oralité, et en particulier donc de l’oralité première du texte coranique.
– L’unité fondamentale du texte coranique est ainsi le verset/âya qui formellement correspond à un vers dit libre, une forme de prose rimée. Cependant, d’une part, la rime coranique est sans rapport avec les règles de versification de la poésie arabe et, d’autre part, sa rythmique souple et naturelle n’est pas régie par la métrique aussi complexe que rigide de ladite poésie. Il est donc courant de dire que le style des versets/âyât du Coran serait de type saj‘u.[11] Ce terme définit effectivement une prose rimée et rythmée que l’on affirme avoir été la forme d’expression employée par les devins/kuhhân, au sing. kahîn, qui déclamaient ainsi leurs augures et prédictions. Le Coran s’inscrirait donc la continuité de cette prose déclamatoire et incantatoire, ce qui permettrait du point de vue littéraire de le relier historiquement à quelques antécédents culturels de l’Arabie. L’on cite alors d’anciens passages divinatoires rédigés en saj‘, mais plus encore que le registre/diwân de la poésie arabe antéislamique, il ne s’agit là que d’apocryphes postérieurs au Coran se présentant plus comme des imitations du style coranique que comme des antécédents pré-coraniques historiquement attestés. Tant pour les classiques que pour les islamologues, mais avec des intentions différentes, le fait d’avoir affirmé que les versets coraniques étaient de style saj‘ repose sur le verset suivant : « Rappelle donc encore, car par la grâce de ton Seigneur tu n’es ni un devin ni un possédé. », S52.V29. Il en est déduit que si les Arabes accusaient Muhammad d’être un « devin/kahîn », puisqu’ici il s’en défend, c’est donc qu’il s’exprimait de la même manière que les devins, c.-à-d. supposément en saj‘. Or, en dehors de la circularité biaisée de ce raisonnement, il est aussi précisé qu’il n’est pas un « possédé/majnûn », ce qui est la preuve que ses détracteurs ne visaient pas le style de ses proclamations, mais sa santé mentale et donc le fait qu’il n’était pas le prophète inspiré par Dieu qu’il prétendait être. C’est donc le fond de son discours qui est ici concerné et non la forme, ils récusaient son statut prophétique et l’inspiration divine qui en aurait découlé, d’où l’accusation suivante : « … il l’affabule… », v33. Quant à la forme de ses déclamations elle était assimilée par ses adversaires à de la poésie et non à du saj‘, pour preuve le v29 : « ou bien ils disent : Ce n’est qu’un poète/shâ‘ir… », voir aussi S36.V69, et en S37.V36 les deux accusations sont conjointes : « un poète possédé ». Notre démonstration est confirmée par un autre passage : « Il est [le Coran] la parole d’un noble messager et il n’est pas le propos d’un poète ; combien peu croyez-vous ! Il n’est pas non plus le propos d’un devin ; combien peu réfléchissez-vous ! C’est une révélation du Seigneur des Hommes. », S69.V40-43. Il apparaît donc que la construction littéraire coranique est un genre à part, certes inconnu des Arabes, mais aussi sans autre équivalent dans le monde culturel de son temps. Un ovni littéraire sans antécédents et sans descendants, un style et une esthétique uniques reconnaissables parmi tous, parfaitement libre de toute convention et de tout modèle. Chaque verset coranique est en soi un pur représentant de ces particularités. De même, nous soulignerons que dans le Coran jamais la rime ne privilégie la forme sur le fond.
– Par ailleurs, sémantiquement, un verset peut exprimer une seule idée ou plusieurs, comme il se peut que la signification recherchée nécessite plusieurs versets, la rime en tant que moyen mnémotechnique l’emporte alors sur la construction sémantique. Ceci explique que le Coran précise lui-même que pour l’unité textuelle qu’il qualifie de âya/verset, la rime a fonction technique de séparateur : « Révélation graduelle/tanzîl par le Tout-Miséricordieux, le Tout Miséricorde, un Écrit/kitâb dont les versets/âyât ont été séparés/fuṣṣilat en tant que récitation/qur’ânan en arabe… », S41.V2-3. La forme II faṣṣala signifie séparer et aussi détailler, deuxième signification fréquente dans le Coran et qui lui est à tort généralement ici attribuée. En effet, si l’on considère l’accumulation de vocables structurels en ces deux versets, le sens de séparer est à retenir d’autant plus qu’il est spécifié que cette séparation-segmentation des versets est liée à la récitation en arabe. Au demeurant, de là vient le fait que l’on ait nommé la rime coranique fâsila/séparateur alors que la rime en poésie est dite qâfiya/qui suit.
5- Le verset/âya : unité structurelle
– Pour autant, un verset n’est pas une unité indépendante, mais elle reste intrinsèquement liée aux versets qui l’encadrent. En d’autres termes, à l’origine un verset n’est pas un vers, une maxime, un adage, une sentence, une citation, une devise, un aphorisme, même si cet usage s’est irrémédiablement répandu et si nombre de versets cités isolément ont rempli cette fonction avec le succès que l’on sait. Or, au contraire, le verset rimé est tributaire de son entourage textuel et cela est d’autant plus vrai qu’il est bref. Ainsi le plus bref verset du Coran est-il composé d’un seul mot : mud.hâmmatân, participe dont le sens est vert sombre. Cependant, ce qualificatif est opérant seulement si on le relie aux jardins qui sont mentionnés en amont et sur la description de leur fraîche luxuriance en aval. À l’opposé, S2.V282 est le verset le plus long du Coran et il occupe quinze lignes standards.[12] Il développe un seul point : les conditions de mise par écrit de la dette à terme, sujet évoqué uniquement ici. Si de ce fait il est appelé « verset de la dette/âyat ad–dayn », en réalité il n’est pas pour autant autonome puisqu’il se complète techniquement par le v283 et éthiquement par le v284. Plus encore, ce verset ne fait sens qu’en fonction du chapitre où il s’insère lequel débute au v261 et dont le thème est une critique morale et pragmatique de la richesse et de l’enrichissement.
– Ceci nous amène à un constat essentiel : si le verset/âya est la plus petite unité signifiante indiquée par le Coran lui-même et si un verset n’est donc pas par définition une unité indépendante, l’on en déduit que le texte coranique possède un autre niveau d’organisation. Notre analyse de la composition du texte coranique, en dehors même de la notion de sourates, a effectivement mis en évidence trois types de division que l’on retrouve pour toutes les sourates d’une certaine longueur textuelle. À savoir : les Parties, les Chapitres et les Paragraphes, somme toute des critères de composition classiques.[13] Ce constat s’oppose à l’accusation portée à l’encontre du texte coranique considéré comme inorganisé, à la limite parfois de l’incohérence structurelle et de l’amoncellement thématique, un texte supposé décousu dont on ne pourrait au final qu’isoler les versets un par un ou par groupes. De même, il apparaît inutile d’imaginer une hypothétique structuration complexe dite rhétorique sémitique dont la mise au jour nécessiterait une dissection concentrique spécialisée que le commun des lecteurs ne pourrait ni percevoir ni réaliser. À partir du thème unique propre à chaque sourate, l’on peut aisément noter diverses Parties annonçant une subdivision dudit thème, puis des Chapitres présentant des aspects particuliers de ce thème et, enfin, chacun de ces chapitres est composé d’un ou plusieurs paragraphes correspondants à l’exposé détaillé de ces variations ou à leur modulation. Le verset/âya ne fait donc sens qu’en fonction de son insertion au sein de ce triple dispositif de hiérarchie textuelle. Afin de déterminer le Sens littéral[14] d’un verset, il est ainsi possible de distinguer trois niveaux contextuels, non pas un supposé contexte historique ou un incertain contexte anthropologique ainsi que les chimériques circonstances de révélation,[15] mais un contexte textuel intratextuel.[16] Celui-ci comprend à son tour trois niveaux : 1- Le contexte général : la Partie et le Chapitre auxquels appartient un verset. 2- Le contexte proche : le Paragraphe où le verset se donne à lire. 3- Le contexte d’insertion : la logique de propos des versets immédiats.[17] Le verset/âya n’est donc pas une entité signifiante isolée, mais au contraire une unité sémantique ne faisant sens que contextuellement, c.-à-d. selon les trois niveaux ci-dessus mentionnés, ce point est méthodologiquement essentiel pour notre Analyse Littérale du Coran.[18] À titre de confirmation intratextuelle, l’on observera alors que lorsque âya signifie verset, le Coran l’emploie de manière quasiment constante au pluriel : âyât, ex. : « Pourtant, Nous t’avons révélé des versets explicites… », S2.V99. Ceci indique que le verset/âya sous cet aspect n’est pas une unité textuelle isolée, mais qu’il s’inscrit toujours en un ensemble de versets/âyât en lesquels il fait impérativement sens. Il nous est ainsi possible de comprendre à quel point l’approche du texte par l’exégèse classique fut dommageable puisqu’à l’inverse de la cohérence compositionnelle du texte coranique, dont le verset n’est que la plus petite partie d’un tout signifiant, elle a quasiment atomisé le Texte verset par verset. Ainsi, ce qui était un formidable outil de mémorisation et de conservation du texte est devenu un formidable outil d’interprétation, la signification d’un verset extrait de sa matrice de sens pouvant être modifiée à volonté en fonction des objectifs d’exégèses spécialisées : orthodoxique, dogmatique, juridique, orthopraxique et, actuellement, salafiste, islamiste, réformiste, islamologique, islamophobique.
– le terme âya ne signifie donc pas verset de façon marginale, mais de manière essentielle. Quantitativement, c’est en de nombreux versets que le pluriel âyât a pour signification versets de manière difficilement discutable, ex. : « Voilà ce que Nous te transmettons comme versets/âyât et sage rappel. », S3.V58. De fait, propos s’adresse contextuellement aux juifs en référence aux versets de la Thora ce qui plus est fournissait un point de comparaison et de compréhension pour les premiers réceptionnaires du Coran. Nous pourrions multiplier les occurrences, fort nombreuses, et ce, contrairement aux allégations islamologiques, citons : « Comment donc pourriez-vous dénier alors même que les versets/âyat de Dieu vous sont récités/talâ », S3.V101 ; « Ô Fils d’Adam ! Assurément, il vous parvient des messagers des vôtres vous rapportant Mes versets/âyât… », S7.V35, etc. Les indications coraniques étaient donc suffisantes pour définir avec précision la nature, la structure et la fonction du verset/âya tel qu’il est identifiable dans le Coran. Ainsi, le verset est-il donné comme étant le résultat d’une révélation : « … Nous t’avons révélé des versets explicites… », S2.V99. Du point de vue structurel, citons à nouveau le suivant : « un Écrit/kitâb dont les versets/âyât ont été séparés/fuṣṣilat en tant que récitation/qur’ânan en arabe… », S41.V2-3. Quant à sa fonction, les versets transmettent à l’évidence le Message divin, que ce soit sur des points concrets, ex. : « Mangez donc de ce sur quoi a été mentionné le nom de Dieu si en Ses versets/âyât vous êtes croyants ! », S6.V118, ou de manière générale en ce qui relève de l’explicatif : « C’est ainsi que Dieu vous explicite Ses versets/âyât, puissiez-vous réfléchir ! », S2.V242.
6- Le verset/âya : unité sémantique
– Si à l’évidence le terme-clef âya signifie verset de manière néologique dans le Coran, il n’en demeure pas moins qu’il y avait aussi d’autres significations lexicalement connues des Arabes au temps coranique. Nous les avons signalées en début de cette réflexion et en avons fourni des exemples coraniques, pour rappel : signe, Signe, miracle, signe miraculeux, exemple, preuve, enseignement. Le point commun sémantique et lexical entre ces diverses significations est la notion de signe, le sens premier de âya étant jalon, marqueur, borne, indice, signe, tout signe laissé de manière intentionnelle. Sont ainsi qualifiés de Signes/âyât de Dieu les éléments de la Création de Dieu observables par l’Homme qui sont alors pour lui autant de signes par lesquels il peut se représenter l’Agir divin, Sa présence, Son existence. Le Signe/âya est donc l’indice perceptible d’une réalité non-perceptible, il est ce qui renvoie à autre chose, et s’entend donc parfaitement au sens que la sémantique et la sémiotique lui donnent : un signifiant, le signifiant étant la forme qui renvoie à un signifié. Le Coran est Signe/âya lui-même et les versets/âyât qui le composent sont autant de signes/âyât signifiant faisant sens par le Coran. Le signe/âya coranique, qu’il soit entendu, récité ou lu est une image mentale générée à l’interface de l’ontologie divine et de l’ontologie humaine par voie de révélation, le signifiant par quoi Dieu communique le signifié qu’Il désire, signifié qualifié de ta’wîl, c.-à-d. sens premier du point de vue de l’émetteur et sens littéral du point de vue du récepteur : « Aussi, ceux qui ont à l’esprit quelque déviance s’attacheront à ce qui pourrait en sembler équivoque, cela par désir séditieux et volonté de dépasser son sens premier/ta’wîl. Mais ne connaissent son sens littéral/ta’wîl que Dieu et ceux qui s’enracinent en la connaissance. », S3.V7. La conception linguistique coranique distingue donc le signifiant/âya/signe/verset et le signifié/ta’wîl, mais de manière notable elle ne distingue pas la notion de signification de celle de signifié. Pour le Coran, la signification est le signifié voulu par Dieu. Il n’y a donc pas d’interprétation du signe qui soit nécessaire, pas d’herméneutique, le sens premier/ta’wîl du signe/verset/signifiant/âya est le sens littéral/ta’wîl, lui-même signifié et signification. Cette particularité se traduit par l’absence de terminologie coranique concernant la signification au sens linguistique : ce qui peut être compris d’un énoncé. En effet, l’on note que les verbes arabes qui traduisent la notion de signification sont absents du Coran. Ainsi, le verbe dalla et son substantif dalîl valant pour signifier et signification n’ont dans le Coran que le sens d’indiquer et indication, ex. : S20.V40 et S25.V45. Le verbe ‘anâ et son substantif ma‘nâ de même sens que le précédent et dont le substantif ma‘nâ vaut pour signification est totalement absent du Coran. Le verbe ‘abara/signifier n’est employé qu’une seule fois et au sens d’interpréter un rêve en S12.V43, et son substantif ‘ibra y signifie sujet de réflexion, ex. S3.V13. Quant à la forme II fassara/expliquer, interpréter, le Coran en exploite uniquement le substantif tafsîr et en une seule occurrence : S25.V33. Il s’agit alors de Dieu qui apporte au Prophète une explication, non pas du Coran, mais des propos de ses opposants polythéistes. Cette spécificité objectivement observable confère donc au terme-clef âya/verset une définition propre ne correspondant pas à l’approche sémantique actuelle d’un texte. Le verset est à la fois un signe-signifiant et un signifié qui impose sa signification, c.-à-d. son sens premier ou sens littéral dit ta’wîl. La compréhension herméneutique d’un verset ne peut être alors qu’une interprétation, opération que le Coran, s’il ne l’invalide pas, ne reconnaît pas pour autant comme nécessaire à la compréhension de son signifié, l’interprétation se situe au-delà du ta’wîl voulu par Dieu.[19] Les versets/âyât se donnent donc à comprendre par eux-mêmes, tout comme le Coran. Les versets en tant que formes révélées sont à l’interface de la volonté d’expression divine et de la capacité de compréhension humaine.
7- Le verset/âya : définition coranique
– En synthèse, les différentes significations du terme-clef âya dans le Coran peuvent être regroupées en trois catégories :
– Est un âya ce qui se donne à voir, d’où les significations coraniques : signe, Signe, miracle, signe miraculeux.
– Est un âya ce qui se donne à comprendre, d’où les significations coraniques : enseignement, exemple, preuve.
– Est un âya ce qui se donne à entendre lire ou réciter, d’où la signification coranique : verset.
Notre analyse du terme âya au sens de verset selon ces différentes occurrences coraniques a mis en évidence plusieurs aspects de sa signification : le verset/âya tel que le Coran l’a défini pour lui-même est ainsi un élément signifiant révélé au Prophète à partir du Livre matriciel/umm al–kitâb. Lorsque le Prophète le transmet aux Hommes, le verset/âya devient une unité textuelle récitée et ce n’est que par la suite qu’il devient une unité textuelle écrite. Le verset/âya est structurellement en une prose rimée qui n’est ni du saj‘ ni de la versification propre à la poésie. Le verset/âya est la plus petite unité textuelle identifiée par le Coran, mais ce n’est pas nécessairement un signifiant en lui-même, lequel peut nécessiter plusieurs versets tout comme un verset peut exprimer plusieurs signifiants. Le verset/âya n’est pas une entité signifiante isolée, il ne fait sens que contextuellement, c.-à-d. en fonction de son contexte d’insertion textuelle. Le verset/âya n’a qu’une signification, le signifié voulu par Dieu. Le sens premier/ta’wîl du verset/âya est le sens littéral/ta’wîl, lui-même signifié et signification. Le verset/âyât se donne donc à comprendre par lui-même sans qu’il n’y ait à l’interpréter, l’interprétation est un dépassement du sens littéral premier/ta’wîl.
Dr al Ajamî
[1] Cf. 1– Inspiration et Révélation selon le Coran ; 2 – Terminologie de la Révélation selon le Coran ; 3 – Théorie de la Révélation selon le Coran.
[2] Ex. : S25.V1.
[3] Ex. : S6.V90.
[4] Cf. Le terme kitâb dans le Coran.
[5] Pour le terme kalima voir : 2 – Terminologie de la Révélation selon le Coran et 5 – La “Parole” de Dieu selon le Coran et en Islam.
[6] Sur ce point voir : 3 – Théorie de la Révélation selon le Coran et l’analyse de S2.V106 en L’Abrogation selon le Coran et en Islam.
[7] Cf. note supra.
[8] À ce sujet voir S2.V1.
[9] Le sens de verset pour âya est présentement certain, car il n’est fait en cette sourate aucune mention de signes qui auraient pu être ici rappelés.
[10] Pour l’étude du verbe talâ, voir : 2 – Terminologie de la Révélation selon le Coran.
[11] Le terme saj‘ dérive de la racine saja‘a évoquant la particularité assonantique du roucoulement de la tourterelle.
[12] Par lignes standards nous entendons la pratique d’origine ottomane consistant à présenter le Coran en arabe en fonction de 15 lignes par page. Chaque page débute par un verset et se termine par un verset complet. Cette disposition implique donc que le texte soit plus ou moins ajusté par le jeu d’allongements et de contractions calligraphiques. C’est actuellement l’unique disposition de la recension Ḥafṣ qui est en passe de devenir la référence unique en matière de texte coranique.
[13] Nous pouvons donc d’ores et déjà remarquer qu’il est parfaitement incorrect de qualifier les sourates de chapitres du Coran. Se reporter à 4 – Terminologie du Révélé ; b- le terme sûrat/sourate.
[14] Cf. l’article méthodologique : Le Sens littéral.
[15] Sur ce point, voir notre approche critique : Circonstances de révélation ou révélations de circonstance – asbâb an–nuzûl ?
[16] Pour l’importance de l’intratextualité dans la compréhension du Coran par lui-même, voir : Sens littéral et Intratextualité ainsi que Intratextualité : Exhaustivité, Non-thématicité, Cohérence, Convergence.
[17] Sur ce point essentiel de l’Analyse Littérale du Coran, voir : L’Analyse contextuelle.
[18] Voir l’article méthodologique Analyse littérale du Coran.
[19] L’Exégèse classique reposant essentiellement sur divers types d’interprétations a ainsi conféré au terme ta’wîl le sens d’interprétation, en témoigne ainsi la traduction standard en S3.V7, verset ayant été surinterprété afin d’autoriser, prétendument au nom du Coran, l’activité exégétique par définition interprétative. Ceci, alors même que le terme ta’wîl dérivé de awala connote l’idée de chose première, de retour à l’origine, d’où sa signification de sens premier ou de sens littéral. Étymologiquement et conceptuellement, le ta’wîl est un mouvement de retour vers le sens d’amont alors que l’interprétation est à l’inverse une recherche de sens d’aval vers une infinité de sens. Sur ce point, voir : Les trois intentions herméneutiques.